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Des sexes innombrables. Le genre à l'épreuve de la biologie par Thierry Hoquet

 

         Thierry Hoquet, psychologue, se définit comme
non-dualiste. Cela signifie qu'il accepte toutes les multiplicités de formes
dans le monde. Son livre, paru en 2016 aux éditions Seuil, pose la question du
sexe au regard de ce que la biologie a à en dire.

 

 

Différences entre sexe et genre

 

            Il
existe deux sexes : femelle et mâle, et deux genres : féminin et
masculin. Le sexe est ce qui, en premier, détermine et précède le genre. Dans
la définition du Larousse, le sens « parties génitales » vient en
dernier alors que c'est celui qui prédomine de nos jours. Selon la théorie
scientifique, le genre ne serait qu'une décoration qu'on viendrait ajouter au
sexe défini. On a d'un côté le sexe qui ne varie pas, et de l'autre le genre
qui est relatif. Les définitions biologiques et culturelles sont tellement
enchevêtrées qu'il est difficile de les dissocier, ce qui nous amène à
considérer une réalité unique du genre qui correspond au sexe.

 

 

Les représentations codées des
hommes et des femmes dans notre société

 

             Quand nous regardons les gens dans la rue,
nous faisons inconsciemment des inférences afin de déterminer leur genre sans
même les connaître. Les représentations des femmes et des hommes sont codées et
fonctionnent comme un système de signes par lequel on reconnaît les sexes avant
de pouvoir sonder leur nature ultime.

 Les hommes seraient biologiquement programmés
pour prendre des comportements à risque, tandis que les femmes seraient plus
réfléchies et calmes. La norme sociale vient déterminer les manières dont nous
allons penser le biologique.  

 

 

L'énigme du dimorphisme sexuel

 

 

            Le
dimorphisme sexuel représente la différence d'apparence entre mâle et femelle
d'une même espèce. C'est le cas chez les humains, mais de nombreuses espèces
sont multi-genres, comme les saumons dont le mâle peut prendre quatre
apparences. Certains peuvent être confondus avec des femelles, illustrant qu'un
individu d'un sexe donné n'implique pas forcément une apparence déterminée.

Tout le monde ne rentre pas dans ce
dualisme. Par exemple, au niveau génital, l'anatomie n'est pas exclusivement
binaire, et au niveau chromosomique des personnes peuvent être autres que XY ou
XX.

 

 

Mais alors combien y a-t-il de
sexes ?

 

            Le cas des hermaphrodites, opérés à la naissance, montre la
diversité des parties génitales. Elles touchent à la reproduction sexuelle, où
règne un binarisme presque universel des gamètes. Les mâles produisent des
spermatozoïdes et les femelles des ovules.

Cependant, la nature contient des
espèces transsexuelles : des individus produisant un type de gamètes vont
changer biologiquement pour produire l'autre, ce qu'on appelle protandrie. Le
cas de l'hippocampe mâle se chargeant de la gestation illustre cette notion.

Le binarisme est la norme pour
l'espèce humaine, mais ce n'est pas la seule représentation. Accueillir la
nouveauté et la richesse des phénomènes vivants complexifie l'affaire et
dérange les mentalités qui préfèrent le dualisme biologique originel.