Publié le

Le rapport à l’image aux fondements de l’œuvre

Jusqu’au 6 janvier 2020, le Palais des Beaux-Arts de Lille accueille l’exposition « Le Rêve d’être
artiste »
. En partenariat avec Cité Philo, Régis Cotentin, commissaire de l’exposition, a animé une conférence
à l’auditorium du Palais. Paul Audi,
philosophe, et Olivier Blanckart,
artiste dont plusieurs œuvres sont exposées, ont discuté des rapports entre le
créateur, la création et sa perception par le public.

 

Le rapport à l’image aux fondements de
l’œuvre

 

Le travail d’Olivier Blanckart
part du constat que « nous vivons
dans un monde saturé d’images ; notre réel ce sont les images »
.
Une partie de ses œuvres repose sur des personnalités publiques de notre époque.
Elles ne sont pas dans forcément dans la représentation séduisante mais elles
soignent leur image à grand renfort de codes visuels : imaginerait-on
Donald Trump sans sa mèche blonde ? Autant de personnalités « condamnées à être fidèles à l’image
qu’elles ont fixée d’elles-mêmes »
, somme toute. La « marginalité de l’artiste »
lui laisse alors toute possibilité de se moquer d’eux, en les parodiant.

A l’origine de toute création
artistique, « c’est un corps vivant
qui est à l’œuvre »
rappelle-t-il. Quand il fait une photographie, il
se met parfois en scène et s’auto-représente. Le professeur des Beaux-Arts de
Paris est, par exemple, un fervent défenseur de la « sculpture d’expression humaine » et des modèles
vivants.

 

L’éthique, l’esthétique et l’artiste

 

Paul Audi est à l’origine du concept d’« esth/éthique ». Parmi toutes les façons différentes
d’aborder l’art, il a choisi de voir l’œuvre comme un énoncé, formé d’une
proposition qui repose sur une énonciation. Il s’agit de « raccorder l’œuvre au créateur, le Je qui agit et l’œuvre qui en
résulte ».
L’esth/éthique serait un « point de recouvrement entre l’éthique et l’esthétique ».
Le philosophe part du principe que toute création vient d’un vœu, une
aspiration. La réception publique accompagne, parfois, ce vœu : « Stravinsky produit un choc
révolutionnaire, Koons provoque un choc conservateur »
, répond Olivier
Blanckart à une question du public sur le rapport entre l’époque et l’œuvre.

 

Quelques mots du commissaire de
l’exposition Le Rêve d’Etre Artiste

 

Au Beau Café de l’atrium du
Palais des Beaux-Arts, nous avons discuté avec Régis Cotentin, l’un commissaires
de l’exposition. Il nous explique que l’objectif est de « rendre compte de l’évolution du statut et de l’image de l’artiste au sein de la société, et donc aussi de la mutation
de son rôle social au fil du temps, de la Renaissance à aujourd’hui»
. L’exposition montre l’artiste comme un
être humain dont la vision du monde évolue selon les circonstances, les
opportunités, au gré des rencontres, des hauts et des bas de l’existence. « Comme tous, il cherche comment faire
pour vivre sa vie, à donner du sens à son existence… La création dépend aussi des
bonnes ou mauvaises conditions de ‘la vie d’artiste’ qui n’est pas seulement
faite de projets et d’inspiration
. Peut-être
faudrait-il rajouter un point d’interrogation au titre : ‘ Le rêve
d’être artiste (?)’ »
. Pendant la conférence, Olivier Blanckart
n’a pas non plus occulté la dimension « institutionnelle
et économique »
de son art : parfois, il n’a pas les moyens de
monter ses projets, qu’il garde en maquettes ou en idées.

À travers la peinture, la sculpture,
l’installation, la vidéo et la photo, l’exposition participe peut-être à une
forme de ‘désacralisation’, en rappelant ce qu’est un artiste, fondamentalement,
pour reprendre Nietzsche, un « humain, trop humain ». Régis Cotentin termine
par une conviction personnelle : « on
ne perd pas en grâce en accompagnant le discours artistique de ce corolaire plus
prosaïque, plus pragmatique, car c’est aussi ça, devenir artiste et le rester
dans la durée. Transformer les empêchements en sources d’inspiration, cela fait
également partie du processus créatif.»