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Questionner le vivant grâce à la science-fiction, avec Emilie Querbalec

Ce dimanche 6 novembre, au Musée d’Histoire naturelle de Lille, Emilie Querbalec, romancière et nouvelliste de science-fiction a tenu une conférence sur le vivant dans la science-fiction.

Physiquement, Spok, dans Star Trek, ressemble trait pour trait à un humain avec des oreilles pointues. Car, dans la science-fiction, les formes de vies no-humaines sont beaucoup humanoïdes. La science-fiction donne aussi à voir des monstres ou encore des êtres insectoïdes. Dans toutes ces formes, l’inspiration vient de la vie terrestre. Pour la romancière « la science-fiction va naviguer aux frontières du connu » et titiller l’empathie que nous, humains, pouvons avoir pour le vivant non-humain.

« La frontière entre humain et non-humain est très ténue, ambigüe »

Une autre forme vient, elle, repousser les limites du vivant dans la science-fiction. Les clones, réplicants, cyborgs sont-ils des formes de vie ? 2001 L’Odyssée de l’espace, Terminator, ou encore la créature de Frankenstein viennent poser cette question au public. Car « la frontière être humain et non-humain est très ténue, ambigüe », pour Emilie Querbalec, et la science-fiction vient poser cette question du libre-arbitre, de l’intelligence du non-vivant.

Dans son dernier roman, Les Chants de Nüying, une uchronie – réécriture historique en modifiant un événement du passé – dans laquelle la Révolution scientifique s’est déroulée en Orient et non en Occident, une mission part inspecter une planète à plusieurs dizaines d’années-lumière de la Terre. Cette planète hors du système solaire, Nüying, présente une activité volcanique, thermale et aquatique qui renvoie à la Terre d’il y a plusieurs milliards d’années.

« Rester dans le domaine du vraisemblable »

Emilie Querbalec propose, dans Les Chants de Nüying, d’explorer plusieurs thèmes de la science-fiction. Elle s’aventure dans des formes de vie extraterrestre mais microbiologiques, qui s’éloignent de la vision ‘cliché’ du vivant que l’on se fait. Elle explore une théorie de l’apparition de la vie sur Terre par l’eau. « La thématique de l’eau [dans l’origine de la vie] me parle beaucoup ».

Pour rédiger ce roman, l’écrivaine a travaillé avec un astrophysicien et une microbiologiste, afin de « rester dans le domaine du vraisemblable et du possible ». Elle interroge dans Les Chants de Nüying le lien entre l’infiniment petit de la vie microbiologique et l’infiniment grand de l’exploration spatiale. Elle affirme « avoir besoin de se baser sur les données de la science pour écrire mon récit imaginaire ».

« J’évoque l’idée d’une vie au-delà de la matière »

Aussi, son roman questionne la vie de l’humain. Par la quête de l’altérité radicale de l’un de ses personnages, Brume, qui craint de perdre son humanité en entrant en communication et en lien avec les formes vivantes extraterrestre. Et par la quête transhumaniste d’un des personnages, qui se clone pour ne pas vieillir durant son voyage.

Les Chants de Nüying questionne le fait de briser la limite de la finitude du corps humain, ambition au cœur du transhumanisme. Elle y explore « l’idée d’une vie au-delà de la matière ». Sur ce point, la réalité rattrape la science-fiction, pour le meilleur et – surtout – pour le pire.

Matthieu Launois, ESJ Lille