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Dialogue à propos des conditions de possibilité du communisme

« Nous nous trouvons dans un impasse climatique, énergétique et sociale dont l’origine se
trouve dans le système de valeur capitaliste actuel. En changer est urgent mais les attitudes
post ou anti capitalistes n’apportent pas de solutions viables à la situation ».
C’est le constat de Bernard Friot et Frédéric Lordon, penseurs d’une réponse positive: le
communisme.
Au cours de cette conférence comme dans leur livre En travail. Conversations sur le
communisme dont ils font la promotion, nos deux contemporains ont un seul objectif:
transformer le paradigme actuel par la cohésion d’une classe révolutionnaire communiste
autour de la souveraineté du travail.
Le premier obstacle à l’accomplissement de ce projet est l’ensemble des notions qui diviserait
les penseurs et rendrait donc union et actions impossibles.
Nos deux intervenants commencent par affirmer la cohérence et l’unité de leur idéologie, ils
éclairent leurs supposés dissensus.
En exposant les concepts de « salaire à vie » pour Friot et de « garantie économique
universelle » pour Lordon ils arrivent à un même constat: l’essentiel est de repenser les
prédicats de la valeur en distinguant capitaliste et communiste.
Il n’existerait donc pas de contradiction essentielle entre les penseurs qui tendent vers une
institutionnalisation macro-sociale du communisme.
Là se présente la seconde difficulté : si les penseurs sont d’accord, quid du reste de la société?
Le communisme est-il encore possible? Désirable?
Pour traiter la question de l’avènement d’un État et d’institutions communistes, B.Friot fait un
parallèle entre idéologie communiste actuelle et croyance religieuse. Elles ne penseraient le
monde d’après que comme une utopie. En somme, ce serait une confession de leur
impuissance à transformer le monde actuel, souligne Lordon. Aussi, elles mèneraient à l’attente
d’un « Grand Soir », événement qui renverserait miraculeusement la situation.
Friot s’oppose à cette idée en parlant d’un « Déjà-là » communiste : institutions actuelles qui ont
déjà été acquises par des communistes. Il évoque exemplairement l’institution de la sécurité
sociale ou du traitement des fonctionnaires. Aujourd’hui, il cite également les actions locales et
sociales qui, sans toujours se revendiquer « communistes », en font la preuve par le fait.
Pour lui, il ne s’agit donc pas d’attendre un renversement mais bien de systématiser ce dont le
communisme a déjà été capable.
Concernant la volonté collective d’adhérer au modèle, Lordon s’est attaché à la promouvoir
dans « Rendre le Communisme désirable ». Selon lui, la classe révolutionnaire serait
aujourd’hui en formation, dans tous les sens du terme. Elle se débarrasse à présent de ses
utopies comme l’illustre la sédition de certaines figures capitalistes qui grossissent les rangs du
mouvement révolutionnaire (« cadres et trader repentis »).
Pour les deux intellectuels, le premier acte de fédération révolutionnaire est celui d’affirmation
toujours renouvelée de confiance, de pertinence et de nécessité du modèle communiste, ce
qu’ils font chacun, et aujourd’hui ensemble, dans leurs travaux.
Cette stratégie semble porter ses fruits auprès des spectateurs de la conférence qui en sortiront convaincus.
Reste à déterminer l’utilité de prêcher des croyants dans la situation d’urgence décrite…