La réélection de Trump, plus une défaite démocrate qu’une victoire républicaine ?
Ce mercredi 6 novembre 2024, le festival Citéphilo organisait une table ronde sur les élections américaines, au lendemain de la victoire du républicain Donald Trump. Une réélection haut la main « surprise », au vu des résultats très serrés annoncés dans les sondages. Dans une discussion animée par Anne-Lorraine Bujon de l’Estang, les experts Hélène Quanquin, Julien Jeanneney et Jérémie Gallon ont analysé le triomphe rouge sous le prisme de l’échec du Parti démocrate.
La conférence s’ouvre sur un simple constat : il ne sera pas nécessaire d’attendre quelques jours pour départager les candidats, l’élection présidentielle est jouée et gagnée par Donald Trump. Alors, qu’est-ce que ce résultat vient confirmer ou infirmer, dans notre connaissance du monde américain ?
Le revers d’une campagne démocrate déconnectée
En 2016, Donald Trump remportait l’élection présidentielle, malgré le fait que sa rivale démocrate Hillary Clinton ait gagné le vote populaire, avec plus de 3 millions de voix d’écart. Ce mercredi 6 novembre cependant, les résultats sont tout autre, avec une défaite totale du parti bleu. Un constat qui amène la professeure de civilisation américaine Hélène Quanquin à affirmer « c’est plus le parti démocrate qui a perdu que Trump qui a gagné ». Si selon elle, Joe Biden a une responsabilité dans la trajectoire de cette élection, sa démission tardive entrainant une campagne façon course contre la montre pour sa vice-présidente, le parti démocrate, lui, n’a pas su convaincre les Américains.
Une élection qui selon les intervenants, démontre qu’aux Etats-Unis « la défense des droits n’est plus mobilisatrice ». Au cours de sa campagne éclair, Kamala Harris s’est dressée en rempart à un Donald Trump aux dérives autoritaires. Les Démocrates ont même tenté de rallier les électeurs républicains modérés sous un front de défense démocratique, illustrée par la participation de Liz Cheney à la campagne électorale. Mais c’est une stratégie politique qui selon l’avocat Jérémie Gallon, prouve la « déconnexion de Washington ».
Une « Autre Amérique » : les limites de la politique identitaire
L’Autre Amérique est celle que Kamala Harris n’a pas su saisir. À Washington, l’appel a été lancé pour mobiliser les « minorités » contre la politique républicaine, notamment en matière d’anti-IVG et d’immigration. Les Démocrates ont privilégié une stratégie de vote identitaire, espérant fédérer sur la base des appartenances. « Ils ont trop insisté dessus » appuie Hélène Quanquin, sans prendre en compte que les électeurs puissent avoir d’autres préoccupations, comme l’économie ou la sécurité. Les chiffres montrent pourtant que 45 % du vote hispanique-latino s’est porté au parti républicain, selon Edison Research. Un parti déconnecté des réalités d’une société américaine qui se « droitise » et ne s’émeut plus des discours racistes et sexistes de Donald Trump, trop habituée par leur fort relais médiatique. Lorsque la brutalisation et l’extrême violence de la politique cessent de choquer, cela signifie que Trump a gagné le débat idéologique.
Hannah Marie