François Poulain de la Barre : L'homme féministe du 17°siècle par Marie-Frédérique Pellegrin
Samedi 10 novembre se tenait lieu « Un philosophe féministe à l'époque de Louis XIV : Poulain de la Barre », à l'Auditorium du Palais des Beaux-Arts de Lille. Il s’agissait d’une présentation de Marie-Frédérique Pellegrin, maîtresse de conférences à la faculté de philosophie de Lyon, auteure du livre Poulain de la Barre. Égalité, modernité, radicalité. La présentation était animée par Adèle Van Reeth pour l'émission Les Chemins de la Philosophie sur France Culture.
La rencontre entre Marie-Frédérique Pellegrin et Poulain de la Barre s'est faite par hasard. C'est en étudiant les œuvres de Descartes, grand philosophe qui inspira le mouvement éponyme, que Marie-Frédérique Pellegrin fut interpellée par cet essayiste peu connu. Brillant étudiant de philosophie à la Sorbonne, Poulain de la Barre devait intégrer la prestigieuse faculté de Théologie jusqu’à ce qu’il découvre les théories de Descartes et qu'il interrompe ses études pour pouvoir se consacrer à ce courant. Il écrivit trois essais sur un sujet curieux pour le 17°siècle : les femmes. Ou plutôt écrivait-il pour elles. Sa théorie : les différences que l'on prête aux deux sexes n'existent pas.
L'égalité des deux sexes.
Poulain de la Barre est un cartésien : il pense avec la raison et non pas avec le corps. Il démontre que si le corps de l'homme et de la femme diffèrent en certains points, il n'en est rien pour la raison. Ses ouvrages expliquent que les hommes, en refusant le savoir aux femmes, les ont rendues plus intelligentes. En effet, tout ce qu'elles pouvaient glaner devenait un trésor. Leur intelligence naturelle s'en est ainsi trouvée accrue.
Les hommes pour leur part ont un esprit corrompu, nous dit Poulain, par une éducation qui les éloigne du bon sens. Il va jusqu'à leur conseiller d'aller à l'école des dames pour se féminiser, ce qui signifie pour lui : tendre vers la finesse et l'intelligence.
Eve, la première femme dominée.
Poulain souhaite utiliser son savoir pour faire le relais : il veut écrire pour ces femmes à qui l’on n'accorde pas la connaissance. Dans ses travaux, Poulain de la Barre remonte jusqu'à la Genèse et se rend compte que le tout premier préjugé a été la misogynie : après que le péché originel ait été commis, Adam a soumis Eve et a fait d'elle la première femme dominée.
Des préjugés, Poulain en dénombre trois : l'originel (énoncé précédemment), celui des savants (face aux ignorants) et celui des nobles (face au peuple). Dans son étude, Poulain estime que si le problème vient du savoir, jalousement gardé par les élites, il faut créer une autre source. Il va alors penser un système où les femmes s'éduqueront entre elles. Il en écrira un traité, son second livre : De l'éducation des dames.
Arrivé sans doute trop tôt, Poulain a toutefois laissé un héritage pour les femmes, et les hommes: les bases du courant égalitaire du féminisme que l'on connaît aujourd'hui.