Croyance et foi par Delphine Horvilleur
Croyance et foi
Lors d’une conférence au Musée des Beaux-Arts de Lille ce
 vendredi 10 Novembre, Delphine Horvilleur a abordé plusieurs thèmes au cœur de
 l’actualité du moment, comme l’interprétation des textes religieux ou
 encore la place de la femme dans la religion. 
Le rapport de l’Homme à Dieu
Dans le judaïsme, Dieu n’a pas de nom. Ou plutôt, son nom
 est imprononçable, ce qui semble difficile à expliquer dans un contexte
 majoritairement et traditionnellement chrétien, nous dit Delphine Horvilleur.
 Donner un nom à Dieu, c’est lui donner une finitude. Alors l’Homme, en quelque
 sorte, enferme Dieu dans une définition. 
Dans le Talmud de Babylone, on peut trouver une littérature
 presque athée. En effet, les Hommes considèrent que Dieu leur a donné la
 liberté de penser. Il se retire pour laisser le choix aux Hommes, et ce sont
 par leurs actions qu’ils créeront la Vérité. Ainsi, le judaïsme n’envisage pas
 le rapport entre l’Homme et Dieu comme subordonné, mais plutôt comme une
 relation amoureuse voire parfois conflictuelle. La religion se délimiterait
 alors à la pratique et pas forcément à la transcendance ou la communication
 avec Dieu. 
Mais alors, le blasphème existe-t-il ?, questionne Adèle
 Van Reeth, productrice de l’émission « Les Chemins de la
 philosophie » sur France Culture. C’est en effet une question centrale
 dans notre société actuelle puisqu’elle fait écho à de nombreux évènements
 récents de l’actualité nationale et internationale. Le blasphème est le fait de
 s’imaginer que Dieu est tellement petit qu’il a besoin qu’on intervienne en son
 honneur, explique Delphine Horvilleur. C’est exactement ce que font les Hommes
 qui se lèvent pour le défendre de nos jours, ce qui semble paradoxal. Se pose
 alors la question de l’interprétation des textes religieux. Le Rabbin avait
 effleuré le sujet lors des funérailles de la chroniqueuse de Charlie
 Hebdo : Elsa Cayat.  
La place de la femme dans la religion
Tandis que nombre de religions promettent la complétude, le
 judaïsme s’appuie sur le manque. Le manque d’un Dieu puisque l’Homme, par ses
 choix, est seul responsable de son destin. Le manque de quelque chose dans le
 corps par le biais de la circoncision. Alors pourquoi avoir besoin de
 Dieu ? Et bien la simple conscience d’un plus grand que soi induit un
 manque qui, par causalité, aboutit à la transcendance. Se pose alors la
 question de la place des femmes dans la religion. Comment peuvent-elles vivre
 ce manque sans avoir vécu la circoncision ? 
La réponse politiquement incorrecte mais souvent vrai dans
 les discours religieux est que « les filles, on s’en fout ! » nous
 dit Delphine Horvilleur. Mais qu’est-ce que cela signifie ? La féminité
 occupe peu de place face à la masculinité dans les textes religieux. Nous
 retrouvons alors la problématique de l’interprétation des textes religieux avec
 un œil contemporain. Se pose la question de l’héritage : un fils doit-il
 être en mesure de réinterpréter ou perpétuer la tradition ? La
 conférencière rappelle alors que nombre de vision considérées comme
 « hérétiques » fut un temps, sont la norme absolue de maintenant. 
Pourtant, Delphine Horvilleur admet se décrire comme
 « un rabbin » et non « une rabbine » car cela induirait
 qu’elle exerce sa fonction de manière féminine. Cela signifierait donc qu’elle
 ne remplit pas sa fonction comme un homme remplirait la sienne, que le sens du
 mot « rabbin » change dès lors qu’il passe au féminin. Alors, la
 vision qu’elle nous propose des femmes dans la religion n’est peut-être
 pas la norme absolue actuelle, mais si elle vous a intéressée,
 peut-être pourrait-elle le devenir demain. 
Philippine Wetischek

