Médiarchie : « Il n’est pas intelligent de rejeter les médias » par Yves Citton
«Les
médias sont entre nous, autour de nous et en nous». Ils nous influencent dans nos prises de
décisions et dans nos comportements. C’est l’idée que développe Yves Citton dans son dernier essai Médiarchie (Seuil). Professeur de
littérature et médias à l’Université
Paris VIII, Yves Canton est directeur de la revue Multitudes. Selon
l’auteur, notre rapport aux médias est symptomatique de notre société de
consommation. La démocratie serait-elle en danger face à la médiarchie ? Yves
Citton propose une nouvelle réflexion sur les médias.
Rejet
d’une critique des médias
« Moi
je ne fais pas de critiques des médias mais je ne le décrépite pas du tout » s’explique l'auteur. L’idée
selon laquelle les citoyens sont écervelés
par les réseaux sociaux et les médias est fausse. Les médias structurent
désormais nos sociétés et la vie politique. Nous nous insurgeons et nous les
critiquons sans pour autant nous en détacher. En s’inspirant d’une vision
spinozienne, Yves Citton suggère de ne plus simplement subir les médias mais de les agir.
«
Attention, les médias sont aussi des objets techniques : nous sommes
électrifiés par eux, par ce qu’ils transmettent » s’exclame l’auteur. Les médias ont trois fonctions principales :
enregistrer, transmettre et transformer avec un public de masse. Quand nous
regardons le journal télévisé du 20 heures, certaines images nous affectent.
« Il y a plus que de l’information qui circule ». « On se sent
posséder » ajoute-t-il.
«
A quoi se rend-on attentif ? »
Il
est plus intéressant de comprendre ce que les médias nous font et pas qui ils
sont forcément. Les journalistes doivent continuer à dénoncer les fake-news.
Cependant, avant de chercher la vérité il s’avère nécessaire de se poser la question de la pertinence.
« Pourquoi décide-t-on de diffuser un sujet plutôt qu’un autre ? ». Yves Citton s’interroge sur le
système médiatique actuel : « A quoi se rend-on attentif ? ».
Les
médias qui diffusent de l’information fonctionnent selon un objectif de
circularité: « parce que je fais attention à quelque chose, les médias
vont continuer de me parler de cette chose » schématise-t-il. Les psychologies humaines
sont plus sensibles à certains sujets qu’à d’autres. A titre d’exemple, un
meurtre au couteau requiert plus d’intérêt médiatique que l’épuisement des
ressources en sable. « Ce qui se produit, c’est ce qui se vend »
conclue l’auteur.
Une
économie de l’attention
Capter
l’attention des médias ? « Donald Trump a bien compris ça », s’exclame l’auteur. « Avant
ou après le vote, les affections conditionnent notre choix électoral ou consumériste ». Alors, est-il
possible de faire de la politique dans la situation actuelle ? Comment contrôler
la médiarchie ? Yves Canton donne des clés de réponses dans son dernier essai:
« Il faut commencer par transformer ce qui motive, ce qui fait fonctionner
et met en mouvement cette masse médiatique ».