Les mères pour la paix. La question politique du lien de maternité. | Intervention de Véronique Nahoum-Grappe, présentée par Anne-Lorraine Bujon de l’Estang.
En préambule, Anne-Lorraine Bujon de l’Estang, rédactrice en chef de la revue Esprit et chercheuse à l’Institut français des relations internationales nous présente Véronique Nahoum-Grappe. Anthropologue, ethnologue, maîtresse de conférences à l’EHESS et membre de la revue Esprit, son travail est imprégné de militantisme en faveur des droits de l’Homme. Après des études de lettres et de philosophie, elle a fréquenté et travaillé aux côtés de Françoise Héritier et d’Emmanuel Le Roy Ladurie. Une diversité d’intérêts qui l’amènent à faire de la culture de la violence et de la différence des sexes, ses deux grands thèmes de recherche.
Itinéraire d’une méthodologie d’analyse
Si l’on est tenté de donner une définition monosémique et universelle de la culture, selon Véronique Nahoum-Grappe, il ne peut y avoir de notion stabilisée du mot. De même qu’établir la définition d’une culture contemporaine, est une entreprise complexe. En observant la culture occidentale, elle remarque que les croyances d’une génération tombent rapidement en désuétude pour celle qui succède. Il est alors complexe de décrire des objets culturels à travers une quelconque cohérence et en les considérant imperméables les uns aux autres.
Le lien de parentalité, de la fiction à la réalité
De Vikings, à Games of Thrones en passant par Plus belle la vie, ces trois séries partagent un dénominateur commun : celui de la primauté du lien filial et de la force politique de ce dernier. On peut se demander d’où provient la violence, telle qu’on la retrouve dans Vikings. Elle résulte de l’amour absolu que les parents portent à leurs enfants. De ce constat-là, elle observe que lorsqu’un enfant est tué, le père se venge pour la souffrance subie de la perte d’un fils. Vengeance qui sera à la hauteur de cette injustice, c’est-à-dire violente. La question vindicatoire intra-familiale est inscrite dans notre culture. Qu’il s’agisse de la fiction ou de la réalité, du Moyen-Âge ou du XXI° siècle, ce lien de passion est inhérent à l’homme.
Un mécanisme puissant, mais qui n’est toutefois pas le même pour la mère, illustrant une nouvelle fois la dissymétrie entre l’homme et la femme. De cette réaction qui diffère, on y associe divers clichés. Celui de la femme émotive, imbécile. Contrairement à l’homme qui ne fait preuve de sensibilité, sinon en serait « féminisé ». Conséquence, le féminin n’existe pas dans le champ scientifique, il en est exclu car non pris au sérieux. Ainsi sont évincés ceux dont on n’estime qu’ils ont peu, ou pas d’importance. C’est dans cette condition de non prise en compte historique, que s’inscrivent les mouvements de mères pour la paix.